Même Lansana Konté, au temps où la maladie avait rendu son pouvoir
irréversiblement vulnérable, n’y avait jamais pensé : faire adopter une loi
pour rendre pénalement responsables, les organisateurs d’une manifestation si
celle-ci venait à déboucher sur des casses ou des destructions de biens publics
ou privés. Mais le Professeur Alpha Condé, lui, en a eu l’idée. Les casseurs ou
autres loubards ne sauraient être responsables sur le plan pénal d’actes de
vandalisme mais plutôt leurs chefs, en l’occurrence les organisateurs des
marches. Ainsi, l’un des objectifs recherchés à travers la réforme envisagée
par le président guinéen, c’est de tuer dans l’œuf toute idée de marche.
Car, sans organisateur, il n’ a point de marche. Et s’il n’y a pas de
marche, Condé peut boire son petit lait. Et pour faire avaler une telle pilule
à son peuple, le Pr Condé a eu l’ingénieuse idée de l’entourer d’un ensemble de
réformes dont l’abolition de la peine capitale. Concrètement, le président de
la Guinée fait de la suppression de la peine de mort, un cheval de Troie aux
fins d’entuber les Guinéens par rapport à sa réelle intention qui est de
torpiller, dans un premier temps, le principe même de l’exercice des libertés
individuelles et collectives, et dans un second temps, viser son objectif
ultime qui est de renouveler son bail. En effet, pour réaliser son ambition,
Alpha Condé avance masqué, tout en oubliant la leçon de morale de ce proverbe
africain qui dit que « celui qui est caché voit celui qui cherche ». Autrement
dit, dans cette Afrique, on est suffisamment instruit des stratégies de ces
présidents piqués par le virus de la boulimie du pouvoir. Tout se passe comme
si Alpha Condé a oublié d’où il vient.
Attendu comme sauveur, Alpha Condé se comporte en bourreau de la démocratie
et des libertés
Pour preuve, sans la manifestation du 28 septembre 2009 au cours de
laquelle 157 Guinéens ont été massacrés au nom de leur attachement à la
démocratie et pour avoir répondu à un appel des leaders, Alpha Condé ne serait
pas président aujourd’hui. L’opposant historique n’a-t-il pas construit,
quelque part, son destin sur le sang de ses militants et autres Guinéens tombés
au Stade du 28 septembre 2009, pour avoir défié les ordres de Moussa Dadis
Camara ? A l’analyse, c’est bien dommage pour la Guinée et les Guinéens, que
celui qui devrait incarner la renaissance de la démocratie en devienne la
première menace. Car, attendu comme sauveur, le Professeur se comporte en
bourreau de la démocratie et des libertés.
Et pour cela, Condé aura trahi son peuple et son pays. En règle générale,
les réformes qui ne sont pas de nature à renforcer la démocratie, la
gouvernance et le développement, sont en réalité des outils au service de la
dictature. Ainsi, il n’est pas trop de dire que Condé cherche à rempiler pour
un nouveau mandat. Faut-il s’étonner d’un tel comportement venant d’un tel
homme, quand on sait que les opposants historiques finissent par être des
freins pour la démocratie ? Comme on le dit, le pouvoir révèle l’homme. Maintenant
que son intention est affichée avec un objectif antidémocratique, peut-on
encore raisonner le prince Condé? C’est simplement désespérant, mais on peut
compter sur la sagesse de l’Assemblée nationale dont on espère qu’elle ne
tombera pas dans le piège de la majorité mécanique.
Source : Le Pays
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