"Je peux vous dire que la vie avant Ebola ne sera jamais
égale à la vie après Ebola, à cause des nombreux problèmes que nous
rencontrons", a déclaré vendredi Mme Camara Fanta Oulein, guérie d'Ebola
et membre de l'association des personnes guéries et affectées par Ebola, lors
d'une interview exclusive accordée à Xinhua.
Cette
jeune dame survivante d'Ebola est membre de la première famille ayant été
infectée par la fièvre hémorragique à virus Ebola.
C'était
le 22 mars 2014, quelques semaines après que le gouvernement guinéen a reconnu
officiellement l'existence de la fièvre Ebola en Guinée.
Sur
neuf personnes infectées dans la famille de Mme Fanta Oulein, six sont décédées
et trois seulement ont survécu, dont notre interlocutrice.
"Lorsque
ma famille a été infectée par un cousin malade d'Ebola que nous avions reçu à
la maison, nous avons pensé que nous allions tous mourir, car on disait
qu'Ebola n'avait pas de remède", se souvient encore Mme Fanta Oulein, pour
qui les survivants de cette épidémie ont été sauvés grâce aux traitements
symptomatiques que les malades recevaient dans les centres de traitement Ebola
(CTE) du pays.
Elle
a rappelé qu'avec l'assistance du gouvernement guinéen, de l'Organisation
mondiale de la santé (OMS) et de Médecins sans frontières (MSF), le premier cas
de personne guérie d'Ebola a été notifié à la communauté internationale le 3
avril 2014.
"Après
la sortie de mon cousin, nous avons eu de l'espoir, et j'ai été moi-même
déclarée guérie d'Ebola le 6 avril", a mentionné Mme Fanta Oulein.
Parlant
du rôle des centres de traitement Ebola, elle a souligné que s'il n'y avait pas
de centres de traitements où on isolait les malades pour éviter d'autres
nouvelles infections, la Guinée aurait été encore plus affectée par cette
maladie.
Elle
a estimé que les partenaires étrangers à tous les niveaux ont sauvé non
seulement ceux qui avaient été infectés par la maladie Ebola, mais aussi toute
la Guinée.
Après
cette dure période d'épidémie de fièvre Ebola en Guinée (mars 2014-décembre
2015), les personnes ayant survécu à l'épidémie rencontrent aujourd'hui des
difficultés pour leur réinsertion socio-professionnelle, et même au sein de
leur propre famille, nous a confié Mme Fanta Oulein.
Pour
elle, à cause de la stigmatisation et de la discrimination de la population,
certains survivants d'Ebola ont perdu le travail qu'ils exerçaient avant
l'apparition d'Ebola.
Conséquences
directes de cette situation, c'est la pauvreté et la misère dans les familles
(quelquefois très nombreuses) des personnes guéries d'Ebola.
Toutefois,
après avoir été renvoyée de l'école où elle enseignait, Mme Fanta Oulein a eu
la chance d'être recrutée par MSF pour faire des témoignages à visage
découverts afin de casser le mythe entretenu autour de la fièvre Ebola.
"Quand
mon directeur a su que j'avais été infectée par le virus Ebola, il m'a dit de
quitter son école", a précisé Mme Fanta Oulein, en dénonçant l'attitude de
son ex-directeur d'école.
Avec
la maladie d'Ebola, c'est dur car "une fois que tu as la maladie, tu te
bats pour retrouver ta santé, et une fois que tu es guéri, tu dois te battre
pour retrouver l'environnement de vie dans lequel tu étais avant d'être
malade".
Et
c'est pour cette raison que les personnes survivantes d'Ebola stigmatisées et
rejetées de la société ont décidé de créer une association baptisée
"Association des personnes guéries et affectées par Ebola en Guinée".
Selon
Mme Fanta Oulein, cette association, dont elle est la secrétaire chargée de la
communication, a pour but d'être une "famille d'accueil pour les personnes
déclarées guéries d'Ebola en Guinée".
Actuellement,
les membres de l'ONG se battent contre la stigmatisation et pour la réinsertion
socio-professionnelle et économique des personnes survivantes d'Ebola, et
surtout pour défendre la cause des orphelins d'Ebola.
"Ebola
a laissé beaucoup d'orphelins en Guinée qui n'ont personne pour s'occuper de
leur protection, de leur éducation, ou de leur santé", a-t-elle regretté.
Selon
les statistiques de la direction nationale de l'enfance relevant du ministère
de l'Action sociale, de la Promotion féminine et de l'Enfance, plus de 130.000
enfants ont été affectés par Ebola, avec 6.340 orphelins de pères, de mères ou
ayant perdu les deux parents.
Evoquant
l'état de santé des personnes guéries, Mme Fanta Oulein a affirmé que les
personnes survivantes de cette épidémie restent toujours fragiles à cause des
séquelles signalées chez les uns et chez les autres.
A
en croire ses témoignages, plusieurs personnes survivantes d'Ebola ont des
problèmes de douleurs articulaires, de problèmes ophtalmologiques, des maux
d'oreille ou des problèmes de santé au niveau de l'oesophage, etc.
Dans
l'enceinte du centre de traitement Ebola de Nongo, transformé en centres de
traitements des maladies infectieuses à potentiel épidémique (CTPI), se trouve
le bureau de Mme Fanta Oulein, qui exerce encore comme conseillère
psychosociale pour le compte de MSF.
Au
nom des personnes guéries d'Ebola, Mme Fanta Oulein a sollicité un appui social
en terme d'acception des personnes survivantes d'Ebola au sein de la société
guinéenne, sans aucune forme de discrimination ou de stigmatisation.
Par
ailleurs, elle souhaite un soutien fort en faveur des orphelins d'Ebola, ainsi
qu'un appui en termes de soins de santé pour les survivants d'Ebola qui
manifestent d'autres pathologies secondaires.
"Aujourd'hui
on se rend compte que les guéris d'Ebola ont aussi d'autres problèmes de santé
qui peuvent être fatals s'ils ne bénéficient pas d'une prise en charge médicale
durable", a expliqué Mme Fanta Oulein, avant de réaffirmer que
"l'appui sanitaire est indispensable pour les guéris d'Ebola".
Source :
Xinhua
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